mardi 22 octobre 2013

L’outil : Activity-based costing

Deux problématiques principales sont attribuables aux coûts environnementaux:
-    Les coûts environnementaux sont simplement additionnés aux frais généraux, ce qui empêche la traçabilité et un suivi de la réelle consommation par les produits;
-    Les méthodes d’allocations des frais indirects, dont les frais généraux, sont peu viables et manquent de sophistication.[1][2]

                Le processus de gestion des coûts environnementaux comprend bien entendu l’étape cruciale d’identification (figure 1[3]).


                Une fois cette étape réalisée, l’erreur des entreprises est d’additionner ces coûts environnementaux aux frais généraux et de maintenir l’allocation (dans le cas d’une distribution des frais indirects) jusqu’aux produits de la façon courante, sans réflexion supplémentaire sur la justesse d’une telle allocation des coûts environnementaux.  Plus la portion de ces coûts est élevée par rapport aux autres frais généraux et plus le biais sera important.  Cette allocation biaisée peut pousser les entreprises à prendre de mauvaises décisions sur les mauvais produits.
                L’ABC est, en partie, une solution, selon sa méthode d’utilisation[4].  La première méthode consiste à distribuer les coûts environnementaux aux activités, selon leur proportion de consommation, puis aux produits.  L’attribution aux produits selon leur consommation d’activités augmente la pertinence de la répartition.
      Méthode 1




               















           Cette méthode n’est possible que si les frais environnementaux ont d’abord été dissociés des frais généraux.  Sans cette première extraction, les coûts environnementaux seront simplement distribués aux activités sur la base de distribution des frais ‘overhead’, ce qui n’apporte rien en terme de constatation de consommation par les produits.

                La deuxième méthode (voir figure méthode 2) isole les activités s’apparentant aux pratiques environnementales et permet de retracer ces coûts en provenance des autres centres de ressources qui n'étaient, jusqu'alors, pas considérer dans cette optique.  De plus, nous pouvons ajouter à la justesse en utilisant un inducteur spécifique à cette nouvelle activité.  La distribution des coûts environnementaux ne se fera dès lors plus sur la base de consommation des activités du processus de production de l’entreprise (assemblage, découpage, etc), mais sur la base d’un inducteur plus précis.  L’inducteur ‘environnemental’ utilisé pourra se rapporter d’avantage à l’objet de coût directement et à sa réelle ‘consommation’ de ce type de coûts[5]. Quatre types d’inducteurs sont considérés (Nations Unies, 2001)[6][7] :


  1.      Volume d’émissions ou de déchets (rejets) traités
  2.      Toxicité des émissions ou des déchets (rejets) traités
  3.      Impacts environnementaux des émissions ou déchets (rejets)
  4.      Coûts relatifs aux traitements des émissions ou des déchets (rejets).




     Méthode 2




 














             Plusieurs exemples d’application sont disponibles, notamment le cas AT&T[8].  L’équipe de travail mise sur pied pour les besoins de la comptabilité verte a d’abord analysé les meilleures pratiques et les processus de l’entreprise, puis recueilli les informations de son équipe de travail.  Ils ont ensuite choisi l’utilisation de l’ABC comme outil de distribution des coûts environnementaux qui suivrait les principes suivants

  • Where activity based costing  (ABC) captures cost elements in process -- we need to add the environmental elements;
  • Where activity based management (ABM) uses data to make decision -- we need to add the environmental criteria to the decision models.


                La compagnie Double Envelope a, pour sa part, utilisé la première méthode (voir figure méthode 1) en retirant des frais généraux et en isolant au niveau de son Grand Livre (Ressources) ses coûts énergétiques.  Ce poste distinct au niveau de la production permet l’imputation aux divers centres de coûts et informe plus précisément sur leur consommation en énergie[9].

Les faiblesses de la méthode
                L’ABC tend à ne considérer que le présent dans son évaluation et distribution des coûts aux produits.  Il ne prend pas en comptes tous les coûts ‘éventuels’ (voir figure 1) pouvant survenir à un moment ou un autre de la vie du produit.  Une possibilité de résolution de cette faiblesse réside dans l’utilisation superposée de deux méthodes : L’ABC et la méthode du cycle de vie, la deuxième permettant une vision future en incluant les coûts ‘éventuels’ et ceux moins tangibles[10].

              Cette faiblesse peut donc être atténuée par l’association à une deuxième méthode.  Cependant d’autres enjeux demeurent.  La mise en place d’une comptabilité par activités est complexe, demande du temps, une analyse et une connaissance poussée des processus, ce qui signifie des coûts élevés.  Cet outil demande aussi la présence d’un système d’information assez performant qui permettra l’obtention des statistiques et inducteurs nécessaires.  Bien que cet outil semble très efficace, il faut se question sur la nature des activités de l’entreprise, sa taille et son besoin réel d’isoler les coûts environnementaux.  Si cet outil n’était pas déjà au centre de la gestion et distribution des coûts traditionnels, doit-on réellement chambouler toute l’entreprise en vue d’isoler un type de coût en particulier?  Les modes font naître parfois des besoins futiles… Ce pourrait bien être le cas ici.





[1] Henri, Jean-François, cours Gestion des coûts environnementaux, HEC Montréal, 2011
[2] CMA Canada, Outils et techniques de comptabilité environnementale appliqués aux decisions de gestion, 1999, 31 pages
[3] CMA Canada, Outils et techniques de comptabilité environnementale appliqués aux decisions de gestion, 1999, 31 pages
[4] Doody, Helenne, La durabilité environnementale: outils et techniques, CMA Canada, 2010, 82 pages.
[5] Rannou, Clémence & Henri, Jean-François, The better way to measure, CMA Management, june/july 2010, p.29-32.
[6] Nations Unies, Environmental management accounting procedures and principles, 2001, New-York, 144 p.
[7] Michaud, Marc-Olivier, L’Émergence de la comptabilité environnementale: evaluation des pratiques et des perspectives, Université de Sherbrooke, janvier 2008, 55 pages.
[8] EPA, Environnemental accounting case studies: green accounting at AT&T, Washington, EPA 742-R-95-003, 60 p.
[9] Doody, Helenne, La durabilité environnementale: outils et techniques, CMA Canada, 2010, 82 pages.
[10] Kreuze, Jerry G. & Newell, Gale E., ABC and Life-cycle costing for environmental expenditures, Management accounting, February 1994, p.38-42

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